Introduction
Une Soroité Unie
Dues aux diverses opinions et croyances, la lutte pour le suffrage des femmes prit racine différemment dans chacune des provinces du Canada. Par conséquent, les réponses politiques furent également variées. Quelquefois, comme au Québec et au Nouveau-Brunswick, il y eut de nombreux débats et de l’opposition, tandis qu’en Saskatchewan, il y eut moins de résistance gouvernementale.
Dans les Prairies, les suffragettes-chefs de la Saskatchewan, du Manitoba et de l’Alberta coordonnèrent les campagnes. Grâce à leur unité et à leur lobbying constant, les suffragettes poussèrent les trois gouvernements provinciaux à accorder le droit de vote aux femmes, à trois mois d’intervalle. L’an 2016 marque le centenaire du suffrage des femmes en Saskatchewan.
D’autres provinces suivirent et, en 1920, les femmes obtinrent le droit de vote dans sept des dix provinces.
Les Couleurs de la Lutte
Les suffragettes utilisèrent des couleurs spécifiques pour s’identifier et comme symboles du mouvement. Les « suffragettes » militantes britanniques portèrent le violet, le blanc et le vert. Quant aux États-Unis, de nombreuses suffragettes utilisèrent l’or et le noir, tandis que d’autres adaptèrent les couleurs britanniques pour une teinte verte, blanche et dorée.
Au Canada, le mouvement fut moins publiquement visible, et au cours de nos recherches auprès des experts, nous étions incapables de trouver de preuves définitives de couleurs spécifiques utilisées. Cependant, les militantes britanniques et américaines, dont certaines - comme la suffragette britannique, Emmeline Pankhurst – visitèrent
régulièrement le Canada, et auraient certainement inspiré leurs consoeurs.
Il est fort probable que les différentes combinaisons de couleurs, comme celles utilisées dans cette exposition, seraient apparues au Canada.
Un Objectif Commun
Le mouvement suffragiste canadien commença véritablement à la fin du 19e et au début du 20e siècle. Motivées par les mouvements britannique et américain, les partisanes du suffrage des femmes au Canada, appelées « suffragettes», menèrent une campagne sur de diverses questions telles que la prohibition, l’égalité des sexes, les droits de propriété, de meilleures conditions de sécurité au travail, les soins médicaux et la justice sociale.
Malgré leur cheminement différent, les partisanes du suffrage au Canada, en Grande Bretagne et aux États-Unis partagèrent un but commun : Wle droit de vote des femmes.
Des Actes, Pas de Paroles
Au début, les Britanniques suffragistes réclamèrent paisiblement le droit de vote. Cependant, étant donné le manque d’actions parlementaires significatives, quelques femmes, dirigées par la militante, Emmeline Pankhurst, formèrent une faction dissidente – le Women’s Social and Political Union. Elles s’appelèrent « suffragettes » pour se distancier de leurs soeurs suffragistes, et adoptèrent des tactiques militantes. Elles détruisirent, brulèrent et firent éclater des bombes sur des propriétés, provoquèrent des émeutes, s’enchaînèrent aux édifices, et tentèrent d’entrer de force dans la Chambre des communes. Le gouvernement britannique répliqua brutalement en frappant et en arrêtant les manifestantes, ainsi qu’en gavant celles faisant une grève de faim.
Inspirées par leurs soeurs suffragistes d’outre-mer, les Américaines les plus radicales formèrent leur propre organisme : le National Women’s Party. Bien qu’elles ne fussent pas aussi “belligérantes que leurs contreparties britanniques, ces femmes tinrent leurs propres manifestations publique, en occupant des lieux en signe de protestation ainsi qu’en faisant des grèves de faim.
Des Soeurs Par "La Cause"
Bien que plus calme et plus rapidement répandue, la lutte canadienne pour le suffrage des femmes fut tout aussi déterminée.
En Saskatchewan, dans une province fortement dépendante de l’agriculture, les coopératives offrirent aux femmes des occasions de s’engager en politique agraire. Ces agricultrices en assurèrent un leadership essentiel et se joignirent aux organismes urbains. Ensemble, ces « soeurs de la cause » devinrent de puissantes défenseures du suffrage provincial.
Violet McNaughton, chef-suffragette ainsi que directrice de coopératives, put réunir les femmes de partout en Saskatchewan. Avec d’autres chefs suffragettes, Violet rehaussa la conscience et le soutien du public en faisant la collecte de pétitions, en prononçant des discours, et en organisant des rallyes et des autres événements publiques. Sa persistance fut cruciale dans l’obtention du suffrage pour les femmes de la Saskatchewan.
Savoir, C'est Pouvoir
L’éducation joua un rôle majeur dans le mouvement suffragiste. Jusqu’aux années 1900, l’éducation formelle au-delà de l’école primaire fut limitée et difficile pour les femmes, en particulier en Saskatchewan rurale où les fermes étaient isolées et les exigences de la main-d’oeuvre furent saisonnières. Cependant, dès 1900, les écoles à
classe unique devinrent de plus en plus communes. Malgré cela, on s’attendait encore à ce que les filles devinrent d’éventuelles épouses et femmes au foyer, de sorte que l’éducation semblait moins importante pour elles que pour les hommes.
Dès les années 1850, dans les villes, des tuteurs privés oeuvrèrent auprès des classes moyennes et supérieures, et les collèges ou les universités furent accessibles et relativement progressistes. À l’Université de la Saskatchewan, par exemple, en 1907, on inclut l’égalité des sexes directement dans la Loi sur l’établissement de l’Université.
Dans Un Monde Masculin
Bien que les femmes commençassent à profiter des possibilités d’éducation, on les découragea de poursuivre une carrière professionnelle. La plupart d’entre elles s’inscrivirent aux cours d’arts libéraux, obtenant une licence en sciences domestiques.
Peu importe, l’enseignement supérieur fournit aux femmes des chances d’explorer des théories politiques, d’interagir avec leurs paires, et de remettre en question les rôles des sexes. Les diplômées formèrent des associations pour anciennes étudiantes où eurent lieu des discussions sur des questions sociales, telles que le suffrage.
Quelques femmes s’aventurèrent dans des disciplines à prédominance masculine comme la médecine. Elizabeth Scott Matheson fut une de ces femmes. Obtenant une licence du Women’s Medical College de Kingston, elle pratiqua la médecine à Onion Lake, en Saskatchewan. Le ministère des Affaires indiennes la nomma médecin fédéral auprès du peuple autochtone de la région.
Certaines Femmes Desquelles S'Inspirer
Violet McNaughton
Violet McNaughton demeure la championne du suffrage des femmes la plus connue en Saskatchewan. Aussi championne de coopératives et de mouvements agraires provinciaux, elle travailla en étroite collaboration avec les dirigeantes de l’Alberta et du Manitoba pour faire avancer la réforme rurale.
Originaire de Kent en Angleterre, c’est là que Violet découvrit les mouvements coopératifs et suffragistes. Elle apporta avec elle ces connaissances lorsqu’elle immigra à Harris. Là, elle épousa John McNaughton, son plus fidèle partenaire et partisan. Féministe agraire, Violet mena de nombreuses stratégies de réforme sociale qui donnèrent lieu aux succès du suffrage égal, du recrutement de médecins, d’infirmières et de sages-femmes pour les communautés rurales, de l’établissement d’hôpitaux, de bibliothèques et d’écoles, ainsi que des améliorations au système agraire.
Violet McNaughton fut la première femme à siéger au Conseil de direction de la Saskatchewan Grain Growers’ Association. En 1914, elle créa la Women Grain Growers’ Association, et en devint la première présidente. À son Conseil de direction siégèrent Zoa Haight, vice-présidente, et Erma Stocking, secrétairetrésorière.
En 1915, Violet créa le Saskatchewan Equal Franchise Board en unissant trois organismes : la Women Grain Growers’ Association, la Société de tempérance des dames, et la Ligue d’équité politique. Bien que ces organismes épousèrent de très différentes philosophies urbaines et rurales, tous crurent au suffrage égal. En mars 1916, le Saskatchewan Equal Franchise Board atteignit cet objectif à Regina lorsque le premier ministre, Walter Scott, accorda le vote aux femmes de la Saskatchewan.
Cliquez ici pour écouter une entrevue avec Violet McNaughton sur le mouvement de suffrage en Saskatchewan.
Zoa Haight
Comme vice-présidente de la Women Grain Growers’ Association, Zoa Haight servit aux côtés de la présidente, Violet McNaughton.
Bien que sa forte volonté et enthousiasme contrastèrent au comportement calme de Violet, ces deux femmes développèrent un important partenariat politique. Ensemble, elles purent influencer le façonnement de lois provinciales améliorant la vie rurale pour tous.
Zoa fut également vice-présidente du Saskatchewan Equal Franchise Board, un organisme fondé par Violet.
Participante active dans la politique traditionnelle, en 1917, Zoa se présenta comme candidate de Thunder Creek aux élections provinciales en tant que membre de la Ligue non partisane du district. Cependant, elle ne réussit pas à gagner son siège.
Erma Stocking
Erma Stocking servit comme secrétaire-trésorière de la Women Grain Growers’ Association jusqu’en 1917. Elle fut également présidente de la section locale de Woodlawn.
En tant que secrétaire-trésorière, Erma publia les nouvelles de la Women Grain Growers’ Association dans la section des femmes du journal de la Saskatchewan Grain Grower’s Association. Sa chronique comprenait des lettres et des communications d’agricultrices sur l’élevage des enfants, les pratiques domestiques, les travaux de secours et le suffrage.
Erma fut partisane fervente de la création de bibliothèques rurales et crut que l’accès à la littérature contribuerait à instruire les femmes et à enrichir leur vie.
The Beynon Sisters
Les suffragettes de l’Ouest canadien utilisèrent le journalisme comme outil de promotion du suffrage égal dans les Prairies. Les soeurs Beynon de Winnipeg, que Violet McNaughton considérait ses mentors, étaient journalistes et furent fortement impliquées dans la cause.
De 1912 à 1917, Francis Marion Beynon fut rédactrice en chef de la section des femmes du Grain Growers’ Guide - la première femme à occuper ce poste. Sa soeur, Lillian Beynon Thomas, fut rédactrice adjointe du Winnipeg Weekly Free Press, et publia une chronique populaire pour les femmes.
Francis et Lillian furent ouvertement pacifistes et appuyèrent fortement les droits des minorités et des personnes défavorisées.
Annie Hollis
En 1914, Annie partit de Portsmouth, en Angleterre pour immigrer à Shaunavon, en Saskatchewan.
Bien que peu conventionnel à l’époque, Annie continua dans l’enseignement après son mariage. Passionnée par l’éducation, elle aida à établir une école pour les sourds à
Saskatoon.
Annie rejoignit des générations de femmes qui encouragèrent les philosophies de la Women Grain Growers’ Association. Élue au conseil de direction en 1917, elle plaida les questions des femmes, même après l’obtention du vote provincial.
Alice Lawton
Comme première présidente, Alice Lawton dirigea le Saskatchewan Equal Franchise Board. Le Saskatchewan Equal Franchise Board réunit les membres de la Société de tempérance des dames, de la Women Grain Growers’ Association, et de la Ligue d’équité politique.
En février 1916, Alice conduit la délégation, qui obtint le vote pour les femmes, auprès du premier ministre de la Saskatchewan, Walter Scott.
En Faveur ou Opposés
Le Rejet De "La Cause"
L’opposition au mouvement suffragiste vint non seulement des hommes, mais aussi de certaines femmes.
Les anti-suffragettes condamnèrent « la cause » croyant que le vote conduirait aux difficultés familiales et à la dégradation du « rôle convenable » des femmes. Certaines prétendirent qu’en étant mères et femmes au foyer, les femmes n’avaient pas à comprendre les affaires politiques. D’autres avancèrent que les femmes n’étaient pas assez intelligentes pour faire de la politique. Estimant que seuls les hommes possédaient les connaissances et l’expérience pour comprendre les questions complexes, les critiques déclarèrent que les femmes voteraient toujours comme leur mari, et, qu’il fut inutile de leur accorder leur propre bulletin. De plus, les anti-suffragettes indiquèrent que les femmes ne voulaient pas réellement le vote, et que même si elles l’avaient, elles ne l’utiliseraient pas.
Porquois Les Femmes Devraient Voter
Les partisans du suffrage répliquèrent qu’ils ne voulurent pas perturber les rôles des sexes, et qu’au contraire, ils cherchèrent à obtenir le suffrage pour les femmes afin d’avoir une meilleure représentation politique sur la condition féminine. Pour eux, le suffrage n’alla guère à l’encontre des femmes en tant que fournisseurs principaux de soins aux enfants et au domicile, mais plutôt à renforcer ces idéaux en promouvant la participation politique des femmes.
Violet McNaughton, la principale chef-suffragette de la Saskatchewan, souligna que beaucoup d’hommes ayant le droit de vote ne votèrent pas, et ne furent pas jugés comme électeurs inaptes. Elle déclara que, « les femmes voteront comme le firent les hommes : certaines voteront bien, d’autres mal, et d’autres encore ne le feront pas du tout ».
Pour Famille et Pour Foyer
Le « féminisme maternel » est une philosophie où les femmes sont perçues comme les défenseures naturelles du bien-être des enfants et des familles parce qu’elles étaient instinctivement plus chaleureuses et nourricières. Les suffragettes épousant cette idée, affirmèrent que leur lutte pour le suffrage ne chercha pas à perturber l’ordre social, mais plutôt à l’améliorer.
Le féminisme maternel affirma également que les hommes et les femmes occupèrent des « sphères séparées » - les hommes furent responsables des affaires publiques à l’extérieur du foyer, tandis que les femmes prirent soin des tâches domestiques. Cependant, ces « sphères » ne furent pas clairement définies en Saskatchewan car les femmes participèrent souvent aux travaux agricoles, tout comme les hommes. Les agriculteurs et les agricultrices ne se virent pas comme concurrents, mais plutôt comme partenaires vers l’amélioration de la vie rurale.
"Mères de la Race"
La philosophie du féminisme maternel inclut la croyance en la « pureté raciale ». Au début des années 1900, particulièrement dans les régions urbaines, beaucoup de femmes canadobritanniques s’inquiétèrent du nombre croissant d’ immigrants. Se voyant comme génétiquement supérieures, ces femmes, en tant que « mères de la race », se sentirent responsables d’avoir des enfants et d’élever des familles britanniques « convenables ». D’ailleurs, certaines avancèrent que la société avait besoin de préservation et d’avancement raciaux.
Cependant, la Women’s Grain Growers’ Association de la Saskatchewan, reconnut l’importance de recruter des partisanes au mouvement suffragiste, et s’efforça d’inclure et d’instruire les agricultrices immigrantes d’origine non-britannique. Pour Violet McNaughton, les membres de la Women’s Grain Growers’ Association de la Saskatchewan eurent « un devoir envers les femmes dites « étrangères » qui, comme nous, sont maintenant « citoyennes ». »
Défis
Les Divisions Parmi Les Classes
Malgré leur unité dans la lutte, certaines divisions existèrent entre les suffragettes de différentes classes sociales, et ce, particulièrement dans les villes.
Dans les grandes villes, les partisanes les plus ferventes vinrent surtout de la classe moyenne. Ces femmes se sentirent obligées de mener la classe ouvrière vers une vie meilleure. Cependant, de nombreuses citadines ne comprirent pas ces femmes qu’elles tentèrent « d’aider », et ne les considérèrent pas comme leurs paires. Les femmes de la classe ouvrière reconnurent cette condescendance et furent sceptiques d’une telle aide.
Ces divisions furent beaucoup moins évidentes en Saskatchewan. Même dans les villes, il y eut plus d’affinité avec les femmes rurales. De nombreuses suffragettes furent agricultrices, dont les chefs vinrent des mouvements coopératifs où l’on encouragea les partenariats et la solidarité.
Des Défis Régionaux
Des divisions régionales furent apparentes au sein du mouvement suffragiste, en particulier entre « l’Est » du Canada (surtout en Ontario), et « l’Ouest » (dans les Prairies).
Beaucoup de femmes de l’Est déménagèrent en ville à la recherche de meilleures opportunités, mais elles y trouvèrent la vie difficile et coûteuse. Certaines durent travailler dans des conditions dangereuses pour subvenir à leurs besoins ou pour compléter les revenus de leur famille.
Dans les Prairies, les femmes étant moins nombreuses, elles purent trouver rapidement un époux et débuter leur famille. Ces femmes furent de précieuses partenaires dans le maintien et le travail manuel de la ferme. Donc, les hommes de ce milieu les acceptèrent assez facilement comme égales et appuyèrent le mouvement suffragiste. Cependant, celles ne se fixant pas de « bons mariages » furent vulnérables aux lois sur la propriété qui favorisèrent fortement les hommes.
Les Villes et Les Campagnes
Certaines femmes de la Saskatchewan rurale approchèrent avec suspicion et scepticisme les citadines qui ne semblèrent pas bien comprendre les luttes des agricultrices. Les suffragettes-chefs de la province tentèrent de combler cette lacune en créant des organismes unificateurs. Violet McNaughton, par exemple, créa le Saskatchewan Equal Franchise Board (le conseil provincial de suffrage égal), d’autres mirent sur pied des unités du Provincial Equity League, et encore, il y eut la présence imposante de la Société de tempérance des dames.
Bien que dans certains organismes les citadines fussent fortement représentées, et que dans d’autres ce furent plutôt les femmes rurales, toutes partagèrent de similaires objectifs finaux : la prohibition, l’amélioration des soins de santé en milieu rural, la promotion agraire, l’égalité des sexes, la parité du travail, la réforme sociale, et, bien sûr, le suffrage.
L’Union Fait la Force
L'Organisation et La Coopération
Les organismes suffragistes, tels que la Saskatchewan Equal Franchise Board, furent rares en Saskatchewan rurale. Les femmes furent plutôt membres d’organismes agricoles - les précurseurs du mouvement suffragiste. Parmi les membres de ces groupes se trouvèrent celles qui s’engageraient fortement dans « la cause ». Par conséquent, ces organismes prirent un rôle central dans les activités suffragistes.
Les hommes partisans du mouvement, crurent que le suffrage fut un moyen d’influencer le gouvernement provincial à faire de véritables changements. D’ailleurs, les hommes du milieu rural estimèrent que lorsque les femmes auraient le droit de suffrage, elles auraient une plus forte représentation politique dans les villes.
L’Union Fait la Force
D’autres organismes en Saskatchewan aidèrent les femmes à obtenir le droit de vote. La majorité des femmes, citadines ou du milieu rural, en épousèrent les objectifs variés – la prohibition, les soins de santé, l’avancement agricole, l’égalité des sexes, la parité du travail et la réforme sociale.
Comme prolongations d’organismes interprovinciaux et nationaux, ces groupes prirent une importance croissante sous la direction des suffragettes-chefs, dont Violet McNaughton, Zoa Haight, Alice Lawton, Annie Hollis, Erma Stocking et les soeurs Beynon, Lillian et Francis.
Menés par ces femmes, la Saskatchewan Grain Growers’ Association, la Women’s Grain Growers’ Association, la Société de tempérance des femmes de la Saskatchewan, et le Provincial Equal Franchise Board ainsi que des groupements provinciaux d’équité devinrent des entités distinctement saskatchewanaises.
Côte à Côte
En Saskatchewan, les femmes des régions rurales organisèrent et promurent le mouvement suffragiste presqu’entièrement par l’intermédiaire des organismes agraires. Parmi ceux-ci, la Saskatchewan Grain Growers’ Association fut la plus grande et la plus partisane. Fondée au début des années 1900 pour exercer des pressions sur les gouvernements provincial et fédéral afin de démarrer la réforme agraire, la Saskatchewan Grain Growers’ Association réunit à la fois des hommes et des femmes.
Jusqu’au milieu des années 1920, la Saskatchewan Grain Growers’ Association publia un journal, appelé le Grain Growers’ Guide, qui diffusa des nouvelles dans toute la Saskatchewan rurale. Le Guide inclut une section populaire pour femmes, où se trouvèrent des histoires, des lettres au rédacteur, des recettes, de la poésie et des conseils domestiques. La section devint un forum où les femmes purent se partager leurs griefs, expériences, idées et conseils, et où celles, vivantes isolées, purent se soutenir et discuter du droit de vote.
Cultivons le Militantisme des Femmes
En 1914, à partir du Saskatchewan Grain Growers’ Association, Violet McNaughton créa un organisme strictement pour femmes, appelé la Saskatchewan Women Grain Growers’ Association. Elle fut la première présidente, et sous son leadership, avec l’aide de Zoa Haight et d’autres, la Women Grain Growers’ Association devint plus qu’une prolongation de son association mère.
Ce fut par un travail concerté que la Women Grain Growers’ Association et la Grain Growers’ Association devinrent les principaux champions du suffrage des femmes en Saskatchewan. D’ailleurs, la Women Grain Growers’ Association fut au coeur de la création du régime rural de soins de santé, y compris l’embauche de médecins et d’infirmières, la création de bibliothèques, et l’adoption de lois protégeant les droits des femmes et des enfants.
Ce Qui Donne à Réfléchir
Entre le mouvement de tempérance et celui du suffrage, le lien fut particulièrement proche. La Société de tempérance des dames joua un rôle important dans la promotion et le succès de la cause du suffrage. Nés dans les zones urbaines, les chapitres de la Société de tempérance des dames apparurent rapidement en Saskatchewan, dès le début des années 1900.
Beaucoup de femmes de la Saskatchewan virent la consommation d’alcool comme la cause fondamentale de la violence domestique, du chômage, de la pauvreté, et des familles désintégrées. Cependant, les dirigeantes de la Société de tempérance des dames reconnurent que leurs membres furent plutôt des femmes sans influence politique. Croyant que l’admission au suffrage mènerait les femmes à voter pour la prohibition, la Société de tempérance des dames, s’unit aux groupes de suffrage provinciaux. Inévitablement, les femmes membres d’un organisme semblèrent devenir aussi celles de l’autre.
Des Voix et des Votes
Le 14 février 1916, la Saskatchewan Equal Franchise Board présenta à Walter Scott, premier ministre de la Saskatchewan, une pétition de 10 000 signatures demandant
le droit de vote pour les femmes. Exactement un mois plus tard, le 14 mars, le suffrage provincial leur fut accordé.
En Saskatchewan, le 26 juin 1917, les femmes votèrent pour la première fois. Aussi, la première candidate électorale, Zoa Haight, se présenta dans la circonscription de Thunder Creek comme Indépendante.
Ces élections causèrent une certaine division dans la Saskatchewan Equal Franchise Board. Plusieurs femmes appuyèrent les Libéraux, tandis que d’autres, comme Zoa Haight et Violet McNaughton, crurent que la réforme ne put venir que par les partis non - partisans. Les Libéraux y remportèrent une victoire écrasante.
Écoutez le discours d'Alice Lawton à Walter Scott
Écoutez la réponse du premier ministre Walter Scott
Écoutez "Women Revieve the Vote."
Un Monde en Évolution
Le rôle des sexes changea radicalement après le déclenchement de la Grande Guerre car les femmes remplacèrent les hommes aux services des forces armées. Dans des emplois, qui autrefois furent exclusivement pour les hommes, elles eurent de nouvelles opportunités. Ces emplois répondirent à la demande accrue de produits dans les secteurs alimentaires, industriels et de la fabrication. En Saskatchewan rurale, les femmes se chargèrent du travail à la ferme, et dans les villes, beaucoup travaillèrent dans des usines.
La guerre apporta des changements sociétaux ainsi que des divisions parmi les suffragettes des Prairies. Les soeurs Beynon, par exemple, furent pacifistes ardentes. D’autres, comme Violet McNaughton, furent « pacifistes patriotiques » n’acceptant pas la participation du Canada à la guerre, toutefois, elles restèrent fidèles à la Grande-Bretagne et contribuèrent à l’effort de guerre.
La Loi des Élections en Temps de Guerre
La Grande Guerre poussa le gouvernement fédéral à contempler sérieusement le mouvement de suffrage.
En 1917, le Premier ministre, Sir Robert Borden, avait deux objectifs principaux : remporter la prochaine élection fédérale, et passer un projet de loi controversé sur le service militaire obligatoire pour tous les hommes du Canada. Borden réalisa que les femmes, ayant des parents mâles servant à l’étranger, appuieraient le service militaire obligatoire tout en lui fournissant le soutien nécessaire pour rester au pouvoir.
En septembre, le Parlement adopta la Loi des élections en temps de guerre. Cette loi donna le suffrage aux femmes d’origine britannique ayant des parents mâles servant dans la guerre ainsi qu’aux 2 845 infirmières militaires, membres du Service de santé de l’armée canadienne.
Le Pays Emboîta le Pas
La Loi des élections en temps de guerre ne plut pas aux suffragettes. Le Saskatchewan Equal Franchise Board déclara ouvertement que la Loi minait la cause du suffrage en donnant le vote à quelques privilégiées. Les soeurs Beynon appelèrent ce suffrage partiel « antidémocratique ».
Après l’adoption de la Loi des élections en temps de guerre, le Premier ministre Borden se rendit compte qu’il ne put s’opposer au suffrage pour toutes les femmes. Le 24 mai 1918, les femmes canadiennes, âgées de plus de 21 ans, possédant des biens et étant d’origine britannique, reçurent le droit de vote aux élections fédérales.
Cependant en 1918, pour certaines femmes, la lutte pour le suffrage ne finit pas là car celles de minorité raciale ne reçurent pas le droit de vote aux élections fédérales.
L'Expansion de la Démocratie
Laissés de Côté
L’Acte des Sauvages de 1876 considéra les Indiens inscrits comme « pupilles de l’État » sans citoyenneté complète, donc exclus du vote.
En 1960, le Premier ministre John Diefenbaker accorda le vote fédéral à tous les Autochtones. Peu de temps après, le premier ministre Tommy Douglas accorda le droit de vote provincial aux Autochtones de la Saskatchewan.
Cependant, pour les femmes autochtones, les politiques discriminatoires sur le suffrage continuèrent. Jusqu’en 1985, lorsqu’une femme de Première Nation épousa un « non-Indien », elle et ses enfants perdirent leurs droits et leur statut d’Indien. D’autre part, lorsqu’une femme non autochtone épousa un homme de Première Nation, elle devint légalement « Indienne », et jusqu’en 1960, perdit son droit de voter.
Le Projet de Loi C-31
En 1985, on ajouta le Projet de loi C-31 à la Charte canadienne des droits et libertés. Ce projet de loi supprima la pratique discriminatoire de refuser à une Autochtone ses droits lorsqu’elle épousa un homme non autochtone.
Lorsque le projet de loi entra en vigueur, les femmes autochtones et leurs enfants purent demander le rétablissement de leur statut. Toutefois, ce processus fut extrêmement difficile car les candidats devaient se rendre aux bureaux du ministère des Affaires indiennes, ce qui était inabordable pour de nombreuses femmes vivant dans des collectivités éloignées. En outre, elles durent payer des frais supplémentaires pour faire la recherche de preuves de leur statut autochtone. Ainsi, malgré ce projet de loi, pour les femmes défavorisées financièrement ou autrement, le processus de rétablissement de statut fut inaccessible.
Exclus
Bien que le suffrage des femmes soit établi au Canada, les femmes de minorité visible en furent exclues. Pour les Canadiens d’ethnie chinoise, japonaise et hindou, le suffrage ne fut pas autorisé jusque dans les années 1940.
En 1920, les personnes privées du droit de vote provincial à cause de leur race virent leur droit au suffrage fédéral retiré par une clause dans l’Acte des élections fédérales. La Saskatchewan fut l’une de deux provinces canadiennes à nier le droit de vote provincial aux Sino-Canadiens. En 1947, les Canadiens d’ethnie chinoise et hindou reçurent le droit de vote aux niveaux provincial et fédéral, tandis que Canadiens-japonais le reçurent en 1948.
Les Doukhobors et les Mennonites confrontèrent également l’intolérance. La Loi des élections en temps de guerre de 1917 leur refusa le suffrage à cause de leurs croyances religieuses, qui les opposèrent à la participation militaire. Ils ne furent pas autorisés à voter jusqu’en 1955.
Conclusion
Du Triomphe et des Épreuves
Bien que le suffrage soit un succès majeur dans la lutte pour les droits des femmes en Saskatchewan, il déçut les femmes qui avaient travaillé si fort pour l’atteindre. Les partisans de la cause crurent que les femmes utiliseraient leur nouvelle voix politique pour faire adopter des lois qui répondraient aux problèmes sociaux qu’elles avaient combattus, qu’elles obtiendraient une reconnaissance légale en tant que citoyennes, et qu’ensemble, elles voteraient d’une seule voix, mais cela ne se produit pas.
Ironiquement, le droit au suffrage pour lequel se sont combattu les suffragettes – le droit de penser pour elles-mêmes et de pouvoir choisir et voter pour leurs représentants – fut ce qui empêcha l’unité politique qu’elles attendaient. Comme les hommes, les femmes ne s’entendirent pas sur de nombreuses questions politiques, et donc restèrent divisées en fonction des partis traditionnels.
Notre Patrimoine
Aujourd’hui, le suffrage est l’un des droits au coeur de la citoyenneté canadienne. Toutefois, pour les femmes, ce droit fut durement gagné. Au début des années 1900, Violet McNaughton, Zoa Haight et leurs suffragettes soeurs se réunirent pour obtenir ce que les gens dirent ne put se faire – le suffrage égal. Bien que des divisions et des défis restassent après l’octroi du vote, la fondation pour les droits des femmes fut posée.
Le terme « suffragette » n’est plus utilisé, mais peu importe comment les militantes se décrivent aujourd’hui, elles continuent à travailler vers l’équité des sexes et la parité politique - des objectifs lancés par des femmes venues avant elles.
Remerciements
Les expositions ne se créent pas d’elles-mêmes, donc notre capacité de partager les histoires de « Une Sororité unie : Le Suffrage des femmes en Saskatchewan » est due au soutien de nombreuses personnes et organismes.
Nous tenons à remercier le Gouvernement du Canada pour son soutien financier par entremise du Programme d’aide aux musées.
Pour avoir partagé leur expertise, nous remercions sincèrement Dr L. Biggs, Dr K. Carlson, Dr E. Dyck, Dr B. Fairbairn, Dr L. Hammond Ketilson, Dr V. Korinek, Dr M. Lovrod, et W. Roy, et Mlle A. Kreuger, de l’Université de la Saskatchewan, Dr S. Carter de l’Université de l’Alberta, Dr R. Sawatzky du Musée de Manitoba, et Dr V. Strong-Boag de l’Université de la Colombie-Britannique. Vos conseils, encouragements et critiques précieux ont contribué à la réussite de ce projet.
De plus, nous voulons reconnaître nos partenaires des institutions culturelles et patrimoniales. Surtout, le Canadian War Museum / Musée canadien de la guerre, le Grand Coteau Heritage and Cultural Centre (centre patrimonial et culturel du Grand Coteau), le Library and Archives Canada / Bibliothèque et Archives Canada, les Provincial Archives of Saskatchewan (archives provinciales), la Saskatchewan History and Folklore Society (organisme provincial de l’histoire et du folklore de la Saskatchewan), the University of Saskatchewan Archives and Special Collections (archives et collections spéciales de l’Université de Saskatchewan), et le Western Development Museum (musée de développement de l’Ouest). Votre soutien à ce projet ainsi que vos prêts généreux permettront aux visiteurs de s’identifier à des objets fascinants, rendant cette exposition, « Une Sororité unie », plus dynamique et convaincante.
Enfin, nous adressons nos remerciements à tous les autres individus dont le dévouement et les efforts ont contribué à la production de l’exposition, « Une Sororité Unie ».